L'imposture, Camille Bruno, 1901 - drame familial, roman XIXe siècle
L'imposture, Camille Bruno - roman - "- Monsieur de Brisoël, s'il vous plait ? - Au cinquième, à gauche. Et madame de Brisoël entame l'ascension. Pesamment, les deux pieds se posant sur chaque marche, comme font les vieillards et les enfants, elle gravit l'escalier en colimaçon qui mène chez son Parisien de fils. Elle n'a jamais subi pareille fatigue depuis la célébration de ses noces d'argent à l'église de Rennes, dont les marches géantes, usées par places, lui coûtèrent un si rude effort. Elle sent bien aujourd'hui, la bonne dame, ses soixante-quatre ans de vie laborieuse, vie partagée entre l'étroit logis de campagne et le plein air du jardin, vie de paysanne plutôt que de noble dame, vie employée non à broder ses armoiries sur ses mouchoirs, mais à compter les choux et à surveiller les volailles. Pour délassement, la récitation du chapelet et, pour objet d'art, l'enfant. L'enfant, tard venu, longuement couvé. L'enfant, avec sa figure digne de Raphaël, son gazouillement digne de Mozart, ses rondeurs dignes de Clodion. Quel plaisir ç'avait été de s'épuiser pour lui jusqu'au collège quel vide quand il n'avait plus eu besoin de personne , et maintenant qu'il était homme, quel ragoût savoureux dans cette fatigue nouvelle , quelle merveilleuse escapade, quelle fugue juvénile elle faisait là, de venir le surprendre en plein Paris, cette digne matrone si respectable sous son grand chapeau démodé, son châle Ternaux et ses socques." éditions Société d'éditions littéraires et artistiques Librairie Paul Ollendorff, Paris, 1901. Deuxième édition. #romans XIXe siècle, #drame familial, #Paul Ollendorff.
L'imposture, Camille Bruno - roman - "- Monsieur de Brisoël, s'il vous plait ? - Au cinquième, à gauche. Et madame de Brisoël entame l'ascension. Pesamment, les deux pieds se posant sur chaque marche, comme font les vieillards et les enfants, elle gravit l'escalier en colimaçon qui mène chez son Parisien de fils. Elle n'a jamais subi pareille fatigue depuis la célébration de ses noces d'argent à l'église de Rennes, dont les marches géantes, usées par places, lui coûtèrent un si rude effort. Elle sent bien aujourd'hui, la bonne dame, ses soixante-quatre ans de vie laborieuse, vie partagée entre l'étroit logis de campagne et le plein air du jardin, vie de paysanne plutôt que de noble dame, vie employée non à broder ses armoiries sur ses mouchoirs, mais à compter les choux et à surveiller les volailles. Pour délassement, la récitation du chapelet et, pour objet d'art, l'enfant. L'enfant, tard venu, longuement couvé. L'enfant, avec sa figure digne de Raphaël, son gazouillement digne de Mozart, ses rondeurs dignes de Clodion. Quel plaisir ç'avait été de s'épuiser pour lui jusqu'au collège quel vide quand il n'avait plus eu besoin de personne , et maintenant qu'il était homme, quel ragoût savoureux dans cette fatigue nouvelle , quelle merveilleuse escapade, quelle fugue juvénile elle faisait là, de venir le surprendre en plein Paris, cette digne matrone si respectable sous son grand chapeau démodé, son châle Ternaux et ses socques , Ses bons yeux brillaient sous ses lunettes, et sa main tremblait dans les gants de fil dont le décorum lui imposait la gêne inusitée. Au troisième palier, elle s'arrêta, hors d'haleine, pour reprendre de nouvelles forces. Elle entendit s'ouvrir la porte du dernier étage, et une voix bien connue dire avec précipitation : - Oui, c'est cela , ici, le 23 à deux heures. Au revoir. Puis, deux talons claquèrent sur les marches, un bout de jupe apparut, et une femme, de trente ans environ, déboucha devant madame de Brisoël. Une vraie Parisienne, celle-là, riche et de grand ton, comme en témoignait sa mise élégante et discrète."
éditions Société d'éditions littéraires et artistiques Librairie Paul Ollendorff, Paris, 1901. Deuxième édition. #romans XIXe siècle, #drame familial, #Paul Ollendorff.
Description : livre relié, couverture toilée, 313 pages. format 18 cm x 12 cm. bon état. usure de couverture.